En stage à Lyon la semaine dernière, Valérie Garnier, l’entraineur de l’Équipe de France Féminine a accepté de répondre à nos questions.
Vous avez commencé votre préparation pour l’EuroBasket depuis jeudi dernier, quelles sont vos attentes sur ce stage à Lyon ?
Le premier objectif est d’harmoniser les états de forme car on se retrouve avec un groupe où certaines joueuses ont eu une charge de travail très importante. Par exemple les joueuses de Bourges ont disputé 53 matchs dans l’année, les joueuses de Montpellier en sont à 44 alors que des joueuses comme Ana en ont disputé une trentaine. Il faut relancer les joueuses qui ont arrêté il y a un mois et faire récupérer celles qui sortent d’une saison courte mais intense. On en a également profité pour mettre en place notre plan de jeu ainsi que nos caractéristiques collectives.
Globalement, comment sentez-vous votre groupe ?
C’est un groupe qui vit bien et c’est important. On peut dégager une forte intensité physique. Il y a des joueuses d’expérience, de la jeunesse, du physique, de la qualité technique donc nous allons essayer de préparer un beau mélange avec toutes ces caractéristiques.
Après avoir décroché une 7° place à la Coupe du Monde l’année dernière, l’EuroBasket en Hongrie et Roumanie sera votre deuxième compétition majeure en tant que coach principale. Quel est votre objectif ?
Il faut que le groupe soit prêt dès le premier match. S’il y a des enseignements à tirer du dernier championnat du monde c’est qu’il faut réussir son entrée en matière car cela peut nous basculer dans un groupe ou dans un autre. Ce championnat d’Europe, comme tous les championnats d’Europe qui précèdent une olympiade, sera de très haut niveau.
On notera le retour de joueuses qui avaient mis leur carrière internationale entre parenthèses, comme Isabelle Yacoubou pour nous. De nombreuses joueuses étrangères ont été naturalisées avec par exemple Kristi Toliver qui a rejoint la Slovaquie ou encore Danielle Page pour la Serbie. Le titre de Championne d’Europe intéresse tout le monde bien évidemment. Après il ne faut pas négliger les 2°, 3°, 4° et 5° places qui sont aussi très importantes car elles donneront accès au tournoi de qualification pour les Jeux Olympiques. Il faut passer les quarts de finales comme dans toutes les compétitions internationales.
Vous avez été nommée entraineur de Carqueiranne juste après avoir mis un terme à votre carrière de joueuse à Strasbourg. Entraîner était la suite logique après votre carrière de joueuse ?
Oui, sans hésitation. Quand j’étais enfant, j’avais un rêve : celui de devenir joueuse de haut niveau, de porter le maillot de l’Équipe de France. Quand on me demandait « mais que feras-tu après ? Une carrière de joueuse est assez courte, on ne peut pas jouer éternellement ! » Je leur répondais « ce n’est pas grave car ensuite, j’entrainerai. »
Je peux dire que j’ai réalisé mon rêve d’enfant en jouant et en entrainant au plus haut niveau. Je suis une privilégiée car c’est formidable de pouvoir vivre de sa passion.
Comment a évolué le basket féminin entre vos débuts au BAC Mirande en 1983 et aujourd’hui ?
Plus que d’un point de vue technique et tactique, la différence est surtout au niveau physique. Quand je vois les joueuses de ma génération, les intérieures étaient beaucoup moins athlétiques qu’aujourd’hui. Tout est monté d’un cran musculairement, en intensité, en taille ou encore en vitesse d’exécution.
Parmi toutes les joueuses que vous avez côtoyé durant votre carrière, quelles sont celles qui vous ont le plus marqué et pourquoi ?
J’ai eu la chance de me confronter à beaucoup de très grandes joueuses comme par exemple Yannick Souvré avec qui j’ai partagé le poste de meneuse à Mirande et en Équipe de France. Je pense également à Odile Santaniello qui aurait sa place dans cette équipe sans problème et qui pourrait mettre à bien toutes ses qualités physiques, techniques et tactiques.
Comment gérez-vous cette double casquette d’entraineur de Bourges et de l’Équipe de France ?
Je pense que c’est difficile pour un entraineur, après 10 mois sans coacher, de lui donner les clés de l’Équipe de France, d’être performant. Comme pour les joueurs, l’entraineur a des réflexes, des connexions à avoir. Posséder cette double casquette est un avantage car cela me donne l’opportunité de voir évoluer toutes les joueuses du championnat de France au cours de l’année. De plus, en participant à l’Euroleague avec Bourges, cela me permet d’être confrontée à nos adversaires et aussi d’observer nos expatriées.
Vous avez côtoyé Alain Jardel et Pierre Vincent en tant qu’assistante coach en EdF. Est-ce difficile de prendre la relève d’entraineurs ayant connu tant de succès ?
J’ai beaucoup de chance car en plus d’avoir été coachée par Alain Jardel, j’ai été son assistante coach en EdF pendant 3 ans. J’ai ensuite été l’assistante de Pierre pendant 2 ans donc j’ai pu avoir beaucoup d’informations qui m’ont permis de me former et de progresser en tant que coach. Il est bien sûr très difficile de passer après de tels entraineurs. J’en ai vu la difficulté quand j’ai pris son relais à Bourges en 2011. J’ai l’habitude de prendre la succession de grands coachs donc j’essaie de gérer au mieux (rires). Le chemin d’une vie passe par des rencontres et j’ai eu la chance de croiser la route d’Alain Jardel. Cette rencontre a été déterminante pour moi en tant que joueuse mais aussi en tant qu’entraineur.
On parle de plus en plus de la médiatisation du basket féminin et du sport féminin en général. Quels sont selon vous les grands axes à travailler pour développer le basket féminin ?
J’ai envie de dire « aller aux JO et d’y disputer la finale » (rires). Nous sommes bien conscients que la médiatisation d’une équipe féminine passe avant tout par les résultats. Il y a eu en 2009 le titre de Championne d’Europe mais ce qui a tout déclenché est, je pense, la finale des JO et l’explosion du phénomène Céline Dumerc. Le phénomène Céline fait que de partout où nous nous déplaçons avec Bourges, la salle est pleine ! On ne s’en rend peut être pas bien compte mais comme je travaille énormément sur vidéo, nous nous apercevons que pour beaucoup de matchs d’Euroleague, les tribunes ne sont pas bien garnies. Je pense que les bons résultats, l’augmentation de la médiatisation ainsi qu’une présence importante sur les réseaux sociaux font qu’aujourd’hui nous progressons même si il y a encore beaucoup d’éléments à développer.